Méditation avec Les saintes voies de la Croix du M. Henri-Marie Boudon

Postez ici vos intentions de prière.
amidelamisericorde
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Méditation avec Les saintes voies de la Croix du M. Henri-Marie Boudon

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LES SAINTES VOIES DE LA CROIX

Où il est traité de plusieurs peines intérieures et extérieures
et des moyens d'en faire bon usage.

À NOTRE-DAME DE PITIÉ


Sainte Vierge, ce petit ouvrage vient se rendre à vos pieds sacrés aussi bien que tous les autres qui sont sortis de mes mains, comme chose qui vous appartient par ma qualité d'esclave ; et parce que vous êtes ma souveraine maîtresse et auguste reine, j'ose vous le dédier, appuyé sur votre douceur inconcevable, comme à la dame de toute pitié, votre douleur n'en ayant jamais eu de semblable parmi les pures créatures :

et de vrai, si la douleur a pour fondement l'amour, il faut bien dire bien dire que la vôtre n'en a jamais eu d'égale, puisque votre amour ne peut souffrir de comparaison.

Aussi êtes-vous toujours incomparable en quelque manière que l'on vous considère. Vos souffrances mériteraient que les créatures fondissent en larmes, et que tous les coeurs se fendissent de regret.

Mais le mien particulièrement ne devrait plus vivre après la vue d'un tel spectacle et si digne de compassion.

Je le confesse, ma divine princesse, il y a longtemps que je devrais être mort de douleur par la considération de l'extrémité de vos peines ; mais d'autre part, je reconnais que je suis entièrement indigne d'une si grande grâce.

Au moins, ô très pieuse et très douce dame, recevez avec votre bénignité ordinaire, ce petit ouvrage consacré à Dieu seul en votre honneur pour une marque des respects que je veux rendre à vos douleurs, pour un témoignage, et de la grande compassion que j'en ai, et de l'amour que je leur désire porter le reste de ma vie.

Ah ! je voudrais, de toute l'étendue de mon coeur, du plus intime de mon âme, que toutes les lignes et toutes les paroles qui le composent, fussent autant de voix qui vous criassent de la terre au ciel que je veux prendre la part possible à toutes vos douleurs, aussi bien qu'à toutes vos joies, à tout ce qui vous a affligée, aussi bien qu'à tout ce qui vous a consolée.

Je voudrais que ce fussent autant de langues qui bénissent et donnassent des louanges sans fin à la très suradorable Trinité, pour la fermeté inviolable et la constance invincible qu'elle vous a données au milieu de tous les orages et de toutes les tempêtes dont votre coeur a été environné sans être ébranlé.

Souffrez, ma glorieuse dame, ces élans d'amour à mon pauvre cœur en votre aimable présence, et obtenez-moi quelque part, et à ceux qui liront cet ouvrage, à l'amour et à la fidélité que vous avez eus pour les saintes voies de la croix. Ainsi soit-il.

Source : livres-mystiques.com

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LES SAINTES VOIES DE LA CROIX

Où il est traité de plusieurs peines intérieures et extérieures
et des moyens d'en faire bon usage.

À SAINT JEAN L'ÉVANGÉLISTE

ET AUX BIENHEUREUSES MARIES SUR LE CALVAIRE


Saintes personnes du Calvaire, plus heureuses mille fois dans l'abjection de ce lieu, que si le Tout-Puissant vous avait donné place sur les trônes les plus augustes de la terre ; après m'être abîmé aux pieds de notre commune souveraine, la digne dame de ce mont d'amour et de croix, je me viens prosterner aux vôtres, pour vous présenter cet ouvrage qui ne respire que l'intérêt de Dieu seul dans les saintes voies de ses souffrances.

Aimable favori de Jésus et de Marie, après notre incomparable mère, ce petit livre vous appartient par mille titres d'obligations inconcevables que j'ai à vos amoureuses bontés ; mais il est encore à vous comme au grand disciple de la croix aussi bien que de l'amour ; puisque notre divin Roi vous a fait le très grand honneur, (ô séraphins, soyez-en étonnés) de vous faire boire au calice que son Père éternel lui avait donné, et qu'il vous a fait un homme de douleur à son imitation.

Aussi a-t-il voulu que vous fussiez le fidèle témoin de la consommation de ses douleurs sur la croix, et que dans cet état crucifiant tous les Chrétiens fussent élevés en votre aimable personne à la qualité glorieuse d'enfants de sa divine mère, qui nous a engendrés à Dieu au milieu d'une mer immense de peines qui pénétraient de toutes parts son coeur virginal au pied de la croix.

Hélas ! Je ne m'étonne pas si, après cela, vous parliez si volontiers des souffrances, comme vous le fîtes bien paraître à sainte Élisabeth de Hongrie, à laquelle vous faisant voir sensiblement, comme à celle que le ciel avait mise par privilège sous votre particulière conduite, pour toute faveur vous lui fîtes la promesse que les croix ne lui manqueraient point.

Heureuse amante du Fils de Dieu, glorieuse sainte Madeleine, je viens ensuite vous offrir ce petit écrit, comme à celle qui a gardé une fidélité inviolable à la croix de notre bon Maître. Beaucoup d'eaux de toutes sortes de peines et contradictions n'ont pu éteindre les ardeurs de votre précieux coeur tout brûlant d'amour pour l'adorable Crucifié, dont il a été tant aimé, et d'une manière capable de ravir les plus sublimes intelligences des cieux, ces esprits du plus pur amour.

Ces vues demandent avec justice, que les cœurs des fidèles vous aiment. Grande sainte, le mien veut s'acquitter de l'amour qu'il vous doit, au moins, selon son petit pouvoir : agréez charitablement ce petit témoignage qu'il vous en donne.

Bienheureuses Maries Jacobé et Salomé, je vous offre encore cet ouvrage de la croix avec les soumissions respectueuses et toutes les affections de mon âme. Bien des raisons m'y obligent, mais spécialement la dévotion très ancienne et immémoriale du diocèse d'Évreux pour vos saintes personnes, qui célèbre votre fête dans son étendue le 23 octobre, en fait une solennité de première classe en son église cathédrale, avec des honneurs qui ne sont pas communs, y ayant de plus dans cette église une chapelle particulière consacrée à votre gloire, où les peuples vont faire leurs dévotions et rendre leurs adorations à la très-adorable Trinité, qui vous a élevées, par sa grande bonté et Miséricorde, à toute la gloire que vous possédez avec des privilèges si extraordinaires.

Source : livres-mystiques.com

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LES SAINTES VOIES DE LA CROIX

Où il est traité de plusieurs peines intérieures et extérieures
et des moyens d'en faire bon usage.

À SAINT JEAN L'ÉVANGÉLISTE

ET AUX BIENHEUREUSES MARIES SUR LE CALVAIRE


De plus, plusieurs belles églises dédiées à Dieu sous l'invocation de votre saint nom, dans l'étendue de mon archidiaconé, me sont encore des motifs bien pressants de vous rendre quelques témoignages de mes respects.

Mais l'alliance que le ciel vous a donnée avec Marie, mère de Jésus, et par conséquent avec Jésus fils de Marie, et surtout l'amour constant et fidèle que vous avez fait paraître pour ce Dieu-Homme crucifié, sont encore à mon égard des raisons qui m'engagent indispensablement à donner des marques de la haute estime que j'ai conçue de votre éminente sainteté, et des désirs ardents que je ressens qu'elle soit plus connue et plus aimée.

Ah ! Que ne suis-je dans le pouvoir de faire connaître partout vos admirables excellences ! Que ne suis-je dans le pouvoir de les faire aimer à tant de peuples qui les connaissent si peu, et qui en sont si peu touchés!
Oui, ô grandes saintes, si je le pouvais, votre dévotion serait non-seulement la dévotion du diocèse d'Évreux, mais de tous les diocèses. Ô mon Seigneur et mon Dieu, augmentez-la de plus en plus dans les lieux où elle est établie, et donnez-la à ceux qui ne l'ont pas.

Rendez-moi digne, selon la multitude de vos grandes Miséricordes, de contribuer en quelque chose en votre vertu dans le diocèse d'Évreux, et spécialement dans l'étendue de l'archidiaconé que je tiens, et ne tiens purement que par une faveur extraordinaire de votre sainte mère, entre les mains de laquelle je l'ai mis, et mets encore entièrement aujourd'hui sous la protection du glorieux saint Taurin, premier apôtre et patron du diocèse d'Évreux (et j'écris ceci par une spéciale providence, le onzième d'août, jour de la fête de ce saint évêque), pour en disposer sans réserve selon votre bon plaisir.

Ô fidèle amant, ô fidèles amantes du Calvaire, recevez donc ce petit témoignage de mon amour et de mes respects, et obtenez-moi la bénédiction de l'adorable Jésus crucifié, et de sa virginale Mère, et à ceux qui liront ces petits traités pour l'honneur et la gloire de la croix de notre Sauveur, qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit, dans les siècles des siècles.

LIVRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER

La science de la Croix est un mystère caché


Il n'y point à douter que la science de la croix ne soit un mystère caché, puisque la divine parole nous l'apprend. C'est ce mystère caché, dont parle l'Apôtre aux Éphésiens (VI, 19), et qu'il nous assure, écrivant au peuple de Corinthe (I Cor. I, 23), avoir été un scandale aux Juifs et une folie aux gentils. Chose étrange que ce mystère, le grand chef-d'uvre de la sagesse d'un Dieu, ait passé pour une folie parmi les nations, et que les plus forts génies et les plus beaux esprits du monde s'en soient moqués. C'est de la sorte que l'esprit humain, demeurant en soi-même, et ne se servant que de ses propres lumières, comprend les choses divines.

Source : livres-mystiques.com

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER

La science de la Croix est un mystère caché


Faites-y réflexion, vous qui lisez ces écrits, et apprenez par la faiblesse de la lumière de l'esprit humain, à ne faire état que des clartés de la foi. Mais ce qui est encore bien plus étonnant, c'est de voir que les Juifs n'ont pas connu ce mystère, quoi qu'il se soit accompli devant leurs yeux, et eussent entre leurs mains les Écritures et les prophéties qui l'avaient prédit en tant d'endroits.

Bien plus, la Sagesse même incarnée, le révélant à ses disciples, il était toujours pour eux une parole cachée ; ils n'en avaient aucun sentiment ; ils avaient même peur d'en avoir plus de connaissance. Le Fils de Dieu leur découvrait ce secret, et il ne laissait pas de leur être voilé par leur peu de disposition, en sorte que leur divin Maître, leur parlant des humiliations de ce mystère profond, l'Évangile nous enseigne que leurs esprits étaient occupés du point d'honneur, et qu'en ce temps-là ils voulaient savoir lequel d'entre eux serait le plus grand.

Ô mon Dieu ! Comment ne point voir, étant si proche de la lumière, et d'une lumière infinie ? Comment ne point apprendre sous un tel Maître. Oh ! Quels sujets d'humiliation, ou, pour mieux dire, d'anéantissement à la créature !

Après cela, cessons de nous étonner, si nous voyons encore tous les jours les disciples du même Maître, tant de Chrétiens, être dans l'ignorance de ce mystère, quoiqu'ils fassent profession de l'honorer : la raison est qu'ils sont bien éloignés de l'esprit de mort et d'anéantissement, qui rend l'âme disposée à l'intelligence de ce divin secret.

Cette sagesse de l'Évangile n'est point entendue par les sages du siècle, dont la prudence est une mort, selon le témoignage du grand Apôtre, qui déclare nettement qu'elle est ennemie de Dieu, parce qu'elle n'est, ni ne peut être sujette à la Loi. (Rom. VIII, 7)

Paroles qui, bien méditées, doivent donner une grande frayeur et une horreur épouvantable de cette maudite sagesse de la chair, qui n'est qu'une folie aux yeux de Dieu et des saints anges.

Grands génies, beaux esprits, qui trouvez parmi les créatures de la terre tant d'estime et d'admiration, apprenez donc que toute votre sagesse n'est qu'une véritable folie : apprenez, ô hommes ! le jugement que vous devez faire, et tâchez, avec la grâce, de vous tirer de l'illusion du monde, dont le jugement est directement opposé et entièrement contraire à celui de Dieu.

Oh ! quel malheur, et quelle source de malheurs, qui ne finiront jamais ! Mépriser ce que Dieu estime, estimer ce que Dieu méprise ; voilà la maxime des sages du monde.

N'est-ce pas pour cela que le grand Apôtre s'écrie : Que personne ne se trompe : si quelqu'un d'entre vous parait sage, qu'il devienne fou. (1 Cor. III, 18) Pour être sage aux yeux de Dieu, il faut être comme un insensé aux yeux du monde, dont les pensées ne sont que pure vanité, dont la prudence est réprouvée de Dieu.

Disons donc ensuite avec le même Apôtre : Que personne ne se glorifie dans les hommes (1 Cor. III, 21) ; dans leurs sentiments, qui ne sont qu'illusion ; dans leur estime, qui n'est que tromperie ; dans le jugement qu'ils font des choses, qui n'est qu'erreur.

Dans un état si déplorable, comment entendraient-ils le mystère caché de la croix ? Non, les mondains n'y comprendront jamais rien, quelque lecture qu'ils fassent, quelque sermon qu'ils entendent.

Source : livres-mystiques.com

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER

La science de la Croix est un mystère caché


Les superbes et les suffisants ne l'entendent jamais ; car il est écrit que Dieu leur résiste, qu'il s'éloigne d'eux. Hélas ! Si ceux qui ont approché de plus près la lumière même, la Sagesse incarnée, ne l'entendaient pas avant la venue du Saint-Esprit, comment pourront l'entendre ceux qui sont plongés dans les ténèbres ?

L'on a donc beau faire de grandes et longues études, prendre des degrés dans les écoles de philosophie et de théologie, se rendre habile dans les plus hautes sciences, et les enseigner même, si la superbe et la suffisance s'y rencontrent, ces gens seront toujours ignorants de la science de la croix ; et avec toute leur doctrine, ils n'arriveront jamais à en savoir l'ABC. Ils sont même entièrement inhabiles pour l'étude de cette science, et tout à fait incapables d'être admis en son école.

Le désir de l'honneur est une opposition formelle à la connaissance de ce mystère, qui ne se donne pas à ceux qui mettent leur joie dans l'estime et l'applaudissement des hommes, et dans l'amitié des créatures, dont ils craignent les rebuts et les contradictions.

Les amateurs d'eux-mêmes, qui travaillent à donner de la satisfaction à leur esprit et à leur corps, et qui se recherchent, n'en auront pas l'intelligence. Les mépris et les abaissements de la croix peuvent être très difficilement aperçus parmi l'éclat des honneurs.

Comment pourrait-on connaître ses douleurs, et goûter ses souffrances parmi les aises de la vie ! La délicatesse des habits et des lits, la somptuosité des meubles, la bonne chère des tables, sont comme autant de voiles épais qui nous dérobent la vue de la croix.

Hélas ! quel rapport de la douceur vaine et trompeuse de la vie du siècle, avec la dureté de ce bois salutaire ! L'empereur Héraclius voulant porter la sainte croix sur laquelle le Fils de Dieu a été crucifié, ne put jamais avancer d'un pas, pendant qu'il demeura vêtu de ses habits royaux ; il fut obligé de prendre un habit simple et pauvre pour avoir cet honneur.

Mais ce qui est bien déplorable, est de voir plusieurs personnes qui font profession de dévotion, qui en parlent, qui la prêchent, et qui cependant sont très peu instruites dans la connaissance de ce mystère. Le grand secret, pour en avoir une véritable lumière, est la pratique, qui est une pratique de pauvreté, de douleur, de mépris, de contradictions, de délaissements, de rebuts, d'ignominies , et comme cette pratique est plus ordinaire aux gens simples, qui sont dans la souffrance et dans la privation de ce que le monde estime, souvent de pauvres idiots, de simples femmelettes, sont bien savants dans cette doctrine, pendant que les doctes n'y connaissent rien.

C'est donc de la sorte, ô Père éternel, qu'il vous a plu d'en ordonner. Vous cachez ces choses aux sages et aux prudents, et vous les révélez aux petits. (Matth. XI, 25) Prenons donc bien garde à marcher toujours dans la simplicité chrétienne, et pour me servir de la comparaison de l'Apôtre, en la IIe Épître aux Corinthiens, craignons que nos sens ne soient corrompus, comme Ève a été séduite par la finesse du serpent. Prenez garde, dit l'Écriture (Eccli. XIII, 16) à votre ouïe.

Ah ! Quil est difficile, n'entendant parler des honneurs, des plaisirs et des biens, qu'avec une grande estime, de ne pas se laisser corrompre par les sentiments du siècle, en prenant ses maximes !

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE II

S'il est à propos décrire des voies de la croix


On ne demande pas ici s'il est à propos de parler ou d'écrire en général des voies de la croix, puisqu'il suffit d'être chrétien pour ne pas ignorer que non seulement il est à propos, mais encore qu'il est nécessaire de parler, de penser et de repenser à des voies par lesquelles tous les disciples du Fils de Dieu doivent marcher indispensablement.

La difficulté est de savoir s'il est bon de traiter en particulier de certaines voies intérieures crucifiantes, à raison des suites qui en peuvent arriver. Il y a des personnes qui disent qu'on ne doit pas écrire de ces peines, parce que les faibles se les impriment facilement dans l'imagination, par la lecture qu'ils en font ; qu'ils s'en forment des états imaginaires, et se persuadent être dans des sentiers fort élevés ; et que les autres s'en choquent et les méprisent.

Cependant la pratique des docteurs et des maîtres de la vie spirituelle est toute contraire au sentiment de ces personnes. Les livres qu'ils ont donnés au public ne laissent aucun lieu de douter de cette vérité. S'il fallait les citer en particulier, il faudrait citer presque tous les grands personnages qui ont écrit des voies mystiques. Nous nous contenterons de rapporter ce que saint Bonaventure en a écrit.

Ce saint docteur (De process. relig., cap, 4, 5), écrivant des voies intérieures crucifiantes, dit que, premièrement il arrive une soustraction de dévotion, ensuite un ennui de prier, d'entendre de bonnes choses, d'en parler ou d'en faire, et d'assister aux choses divines. De plus, l'on est tenté d'impatience contre Dieu ; on va jusqu'à se demander pourquoi il est si dur et cette tentation est si violente, que l'homme est presque hors de soi-même.

Enfin, dit-il, les plus âpres tentations sont d'hésiter en la foi catholique, de désespérer de la Miséricorde de Dieu, de blasphémer, contre lui et ses saints, de vivre dans une certaine perplexité d'une conscience craintive et plaintive, et enfin de n'admettre point de conseil salutaire. Jusqu'ici sont les paroles de ce saint docteur.
Je ne dis rien de saint Jérôme et de saint Bernard, qui ont cru glorifier Dieu en laissant à la postérité la connaissance des tentations qu'ils ont portées contre la pureté, et dont ils ont spécifié plusieurs circonstances particulières. Je ne parle point du grand Apôtre, qui a voulu que toute l'Église sût ses peines sur le même sujet.

Il n'a pu manquer de conduite en les laissant par écrit, puisque le Saint-Esprit le conduisait en écrivant de la sorte. On ne peut pas blâmer avec justice les Pères de l'Église qui ont traité des peines intérieures, puisque la lumière, la prudence, la charité et l'expérience ne leur ont pas manqué. Les saintes femmes mêmes, et les bienheureuses vierges, qui ont donné des écrits an public, ont traité de ces voies de souffrances ; comme, entre plusieurs, sainte Catherine de Gênes, la bienheureuse Angèle de Foligny, dont les peines extrêmes donnent de grands sentiments de compassion, selon le jugement qu'en fait saint François de Sales.

Mais sainte Thérèse, en plusieurs lieux de ses livres, n'a-t-elle pas parlé des peines intérieures ? Le lecteur en pourra voir des témoignages bien forts, que nous rapporterons en plusieurs endroits de ce petit ouvrage.

Les auteurs des Vies des saints n'ont pas fait des difficultés de rapporter leurs sentiments et leurs souffrances. Il ne faut que lire les Vies de ces âmes éminentes en sainteté, tant de celles qui ont vécu dans les premiers temps de l'Église et dans la continuation des siècles, que de celles qui ont paru dans les derniers temps.

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE II

S'il est à propos décrire des voies de la croix


Ne lisons-nous pas qu'un saint Benoît s'est jeté dans les épines, par la violence d'une tentation contre la pureté ; un saint François dans la neige, pressé par la même peine ? Un saint Pierre Célestin s'est trouvé réduit en de grandes angoisses, au sujet de la même tentation. Il y en a eu qui en ont été affligés toute leur vie.

L'histoire de saint François de Sales marque ses peines au sujet de son salut ; celle de la vénérable mère de Chantal en fait voir d'extrêmes, qu'elle a portées durant tout le cours de sa vie. L'histoire de saint Ignace nous apprend les tourments que les scrupules lui ont donnés, jusque-là que ce grand saint fut tenté du désespoir.

La Vie de la bienheureuse Madeleine de Pazzi montre des croix intérieures qui sont terribles. Enfin, les livres des Pères de la vie spirituelle, et les histoires des saints, sont remplies de voies de souffrances.

S'il n'était donc pas à propos d'en écrire, il faudrait condamner les Pères de l'Église, supprimer les livres des docteurs mystiques, et nous ôter l'histoire des Vies des Saints. Mais, dit-on, plusieurs en abusent.

Je réponds que les directeurs doivent veiller à ne pas permettre la lecture des livres qui ne sont pas utiles aux âmes qu'ils conduisent, et qu'un chacun doit prendre garde à ne pas se servir de ce qui ne l'aide pas, ou lui sert d'empêchement dans le chemin de la perfection ; et qu'ainsi il faut faire un choix des livres qui nous sont propres, ne se servant pas indifféremment de toutes sortes de livres spirituels.

Mais s'il arrive que quelques-uns n'en fassent pas un bon usage, il ne faut pas, pour l'abus que l'on fait des choses, les condamner ; autrement il faudrait blâmer l'Écriture sainte, dont tant d'hérétiques ont abusé, les livres des pères de lÉglise, enfin tout ce qu'il y a de plus saint dans la religion.

Mais pourquoi écrire de ces matières ! Les saints docteurs l'ayant fait, cela suffit pour persuader un esprit raisonnable qu'il est utile et nécessaire d'en écrire et d'en parler.

Mais nous pouvons encore dire qu'il est nécessaire d'en traiter pour le besoin de quantité d'âmes qui marchent par ces voies de souffrances, et qui, demeurant dans les petites villes ou dans les villages de la campagne, sont dépourvues de personnes qui leur puissent donner des lumières sur ces états.

Il faudrait avoir passé par ces voies de peines pour savoir dans quelles angoisses la pauvre âme qui les souffre est réduite. Mais, avec toutes ces peines extrêmes, que deviendra-t-elle, ne sachant que faire, et souvent étant tentée de désespoir, et s'imaginant déjà être damnée ; et qui pis est, trouvant quelquefois des confesseurs peu éclairés, qui prendront ses tentations pour des péchés, et ne lui serviront qu'à se perdre d'une manière incroyable à ceux qui n'ont pas d'expérience de ces sortes de tourments et de souffrances !

Si on considère bien la qualité de ces peines, qui surpassent tout ce que l'on peut souffrir au dehors, et les suites qui vont jusqu'à l'éternité, et la grande privation de secours, qui est assez ordinaire à ceux qui sont dans ces tristes situations, on demeurera d'accord qu'il y a une nécessité extrême de donner quelque assistance à ces personnes. Un pauvre, qui mourrait de faim, serait dans un état où il y aurait la dernière obligation de le secourir.

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE II

S'il est à propos décrire des voies de la croix


Mais cet état dont nous parlons, emporte quelque chose de bien plus pressant. Il ne s'agit pas de la vie d'un corps, qu'il faut tôt ou tard perdre ; il est question du salut d'une âme, qui est d'une conséquence infinie.

Or l'éclaircissement que l'on donne, par les livres qui traitent des croix intérieures aux personnes qui les portent, les instruit de la bonté de ces états, de l'amour et douceur de la divine Providence qui les envoie, quoiqu'elle paraisse très rigoureuse, leur apprend comment il faut s'y comporter, les fortifie et les encourage ; les soutient au milieu de leurs abattements et des tentations de découragement et de désespoir, et leur fait faire usage de leurs épreuves, ou des châtiments que l'amour et la justice divine exercent sur elles.

Plusieurs confesseurs et directeurs, qui ne sont pas assez expérimentés dans ces sentiers, reçoivent beaucoup de lumières par la lecture de ces traités ; et enfin, l'adorable Jésus en est beaucoup glorifié dans ses membres, qui ne lui sont jamais plus unis que lorsqu'ils lui sont plus conformes dans ses croix.

La charité donc de Jésus-Christ nous presse de donner ce petit ouvrage pour l'établissement de sa gloire et de celle de sa très sainte Mère, dans les âmes crucifiées.

Le peu d'expérience que j'ai me fait voir très clairement que ces âmes sont entièrement dignes de compassion, et que parmi les personnes qui souffrent ce sont elles qui sont les plus affligées. Que ceux qui ne font pas état de leurs croix me pardonnent ; mais je ne puis douter que ce sont des croix terribles.

Qu'ils pardonnent à quelque peu de zèle qu'il plaît à Notre-Seigneur et à la sainte Vierge de me donner pour leur assistance.

Quand on est un peu pénétré de la longueur de l'éternité, des tourments de l'enfer, du bonheur du paradis, et surtout de la charité excessive, répétons-le, de la charité excessive d'un Dieu-Homme, mourant sur un gibet, au milieu d'une immensité de douleurs, que l'esprit humain ne peut comprendre, pour l'assistance des âmes, on ne passe pas si légèrement sur leurs besoins ; mais qu'y a-t-il qu'on ne doive faire ?

Ô coeur adorable de Jésus, ouvrez-vous ; ô fournaise d'amour, paraissez à vos créatures ; ô charité ineffable, ô Miséricorde excessive, faites-vous connaître. C'est à vous, c'est pour vous que j'écris cet ouvrage ; bénissez-le, et en tirez votre gloire et celle de la divine Marie.

CHAPITRE III

La voie de la croix est le grand chemin royal de la bienheureuse éternité


Il y a plusieurs voies, ô mon Dieu ! qui conduisent à votre bienheureuse jouissance ; il y a plusieurs sentiersjpgui mènent à votre glorieuse éternité. Mais, ô mon Dieu ! vous avez fait un grand chemin qui y conduit, dans la dernière sûreté.

Or, mon âme, ce grand chemin n'est autre que la voie de la sainte croix. Cette voie est le grand chemin royal de tous les élus, parce qu'elle mène à la cité du Roi des rois. Elle est le grand chemin royal, parce que c'est par cette voie que marche la grande troupe des saints, la Reine de tous les saints, et le grand Roi du paradis.

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE III

La voie de la croix est le grand chemin royal de la bienheureuse éternité


Elle est le grand chemin royal du salut ; car c'est par elle que les courriers de la bienheureuse éternité portent les douces dépêches de la grâce ; c'est par elle que marchent les grands convois de vivres nécessaires ; c'est par elle que l'on mène toutes les précieuses marchandises du beau paradis.

Allons mon âme, jusqu'à l'origine du monde ; descendons ensuite de siècle en siècle jusqu'à nos derniers jours. Considérons avec attention ce qui s'est passé dans la loi de nature, dans la loi écrite, et dans la loi de grâce ; et nous verrons bien clairement que la voie de la croix a toujours été le grand chemin royal des élus.

Si je vois un Abel qui est agréable à Dieu, je vois en même temps un Caïn qui le persécute. Il faut qu'un Abraham soit dans la dernière épreuve par l'ordre qu'on lui donne de sacrifier son fils unique.

Job sera réduit sur un fumier, dans un délaissement extrême, méprisé de ses amis, moqué de sa propre femme, et dépouillé de tous ses biens et de ses enfants.

Moïse a un Pharaon pour l'exercer. David a un Absalon son enfant. Elie a une Jésabel. Tobie perd la vue, et est dans le danger de perdre la vie. Saint Jean-Baptiste a un Hérode qui le fera mourir. Tous les apôtres et disciples sont des gens de croix.

S'il se rencontre même de petits innocents, la faiblesse de leur âge ne les exemptera pas de ce chemin rigoureux. Parce qu'ils appartiennent particulièrement à Dieu, ils seront tous baignés dans leur sang, et il leur en coûtera la vie, qu'ils ne font presque que de recevoir.

En un mot, l'Église chante que tous les saints ont bien souffert. Enfin, mon âme, regarde comme le roi de tous les saints celui qui est la voie, la vie et le modèle de toutes les âmes qui seront sauvées, marche à pas de géant, ou pour mieux dire, cours dans cette voie, depuis le premier moment de sa divine conception, jusqu'au dernier moment de sa vie.

Considérez comme la très sainte Vierge, sa bénie mère, lui tient compagnie ; saint Jean l'Évangéliste, son cher favori : sainte Madeleine, sa fidèle amante ; et pour le dire en peu de paroles, tous ceux qu'il a le plus favorisés de son amour.

Souvenez-vous, comme l'Écriture l'enseigne (Apoc. VII, 14), que ceux qui ont été agréables à Dieu, ont passé par beaucoup de tribulations, qu'ils ont été faits ses amis par ses épreuves.

Grande sûreté donc pour tous ceux qui vont par ce chemin, puisque c'est le grand chemin royal du salut : celui qui y marche, est bien en assurance. Ô âme, qui que tu sois, pourquoi t'affliges-tu dans cette voie de la croix ?

Il me semble que j'entends tous les bienheureux, qui savent si bien les routes certaines de la glorieuse éternité, te crier : Ne craignez point, vous êtes bien, vous allez bien, vous tenez le grand chemin royal du ciel. Les voleurs et les homicides n'y sont pas à craindre, car ils fuient devant la croix, avec plus de frayeur et de vitesse, que les hommes ne font devant les canons de la terre et les foudres du ciel.

Il n'en est pas de même dans les voies des consolations temporelles et spirituelles ; nos ennemis invisibles s'y mêlent facilement, s'y cachent, et y sont à couvert ; la chair s'y fortifie, la nature y prend sa vie, l'amour-propre s'y nourrit, l'esprit du monde s'y introduit.

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LIVRE PREMIER

CHAPITRE III

La voie de la croix est le grand chemin royal de la bienheureuse éternité


Ces routes de goût même spirituelles, sont bien dangereuses ; car l'on y prend facilement le change. Quoiqu'on y puisse aller à Dieu, et qu'on y aille, on est souvent tout surpris de voir que, sans y penser, on se trouve dans le chemin de la nature, au lieu de la voie de la grâce.

Les douceurs sensibles provenant de la grâce, les consolations qui arrivent par les satisfactions que l'on a en cette vie, et qui sont innocentes, sont de petits chemins écartés qui peuvent mener au ciel, mais ces petits sentiers vont à travers les terres ; de temps en temps on a de la peine à les découvrir, quelquefois ils manquent, et on ne sait où l'on en est.

On se trouve toujours embarrassé par mille détours qu'ils obligent de faire. Il faut souvent frapper aux portes, et crier pour demander le chemin, et pour savoir si l'on n'est pas égaré ; sans cesse il faut avoir de l'attention, autrement on s'égare.

Mais dans le grand chemin royal de la croix, il ne faut que marcher, il n'y a qu'à suivre ; un aveugle le tiendrait sans s'égarer, y allant au bruit de ceux qui y marchent.

C'est une chose inutile que d'y demander des adresses : il n'y a personne de ceux qui en sont instruits qui ne réponde : Vous n'avez que faire de vous mettre en peine, il n'y a qu'à aller tout droit ; vous ne sauriez jamais manquer, à moins que de plein gré vous ne vouliez quitter ce grand chemin de la croix, pour prendre des sentiers de goûts et de consolations.

Au reste il ne faut pas se troubler, si cette voie paraît fâcheuse à la vue ; il est vrai qu'il y a quantité d'eau à passer, mais le fond en est bon, l'on y marche à pied ferme, il n'y a rien à craindre.

Celui qui voudrait s'en détourner pour aller plus à l'aise parmi les prairies couvertes de fleurs où tout est riant, n'irait pas loin sans trouver des fossés qu'il ne pourrait franchir, ou sans enfoncer tout à coup bien avant dans les terres molles, dont il ne se tirerait pas sans grande difficulté.

Le plus assuré est de tenir le grand chemin frayé par tous les saints du paradis. Il n'y a point de péril à aller par la voie du Fils de Dieu et de sa très sainte Mère.

Ô mon Sauveur, je vois vos vestiges empreints dans ce chemin, j'y remarque très clairement vos traces ; tirez-nous après vous, et ne permettez jamais que nous nous égarions dans les voies du siècle.

Nous vous demandons cette grâce et Miséricorde par votre amour et charité excessive, et par le coeur très aimant de votre aimable Mère, par tous vos anges et vos saints.

Oh ! Que l'aveuglement du monde, qui ne recherche que des voies aisées, est à déplorer ! Mais que le bonheur est grand de ceux qui portent leur croix à la suite d'un Dieu incarné et de sa virginale Mère.

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CHAPITRE IV

Qu'il faut nécessairement marcher par la voie de la croix


Il n'y a point à hésiter sur ce que la divine parole nous assure ; c'est pourquoi il faut croire la voie de la croix nécessaire, puisqu'elle nous l'apprend. Tant de sentiers qu'il vous plaira, où l'on goûte des plaisirs innocents, s'ils mènent au ciel, les roses qui y croissent auront toujours leurs épines.

Que les dures et pesantes croix fassent le grand chemin royal du paradis, il s'en rencontrera toujours de médiocres ou de petites dans toutes les voies qui y peuvent conduire ; car enfin, c'est un oracle prononcé par le Saint-Esprit même : Qu'il nous faut par beaucoup de tribulations entrer dans le royaume de Dieu.
(Act. XIV, 21)

Remarquez que le Saint-Esprit ne nous enseigne pas qu'il est de la bienséance, qu'il est utile, ou quil vaut mieux souffrir ; mais il dit très clairement, qu'il le faut. Il faut donc le faire : il n'y a point à délibérer.

De vrai, la qualité de pécheur demande de soi des souffrances ; car Dieu, qui est très juste, ne peut pas laisser le crime impuni : sa justice le châtie, soit en cette vie, soit en l'autre.

Mais, comme la béatitude est réservée pour l'autre vie à ses bons serviteurs, il est donc nécessaire que leurs fautes soient châtiées en ce monde ; et d'autre part, à la réserve de la Vierge, toujours immaculée, même dans le premier instant de sa toute sainte conception, tous les hommes ont péché : donc tous les hommes doivent porter des croix.

Mais la qualité de Chrétien ne permet pas que l'on soit exempt des souffrances ; car s'il a fallu que l'adorable Jésus, le chef de tous les fidèles, qui ne font qu'un corps mystique avec lui, ait souffert pour entrer dans la gloire, comme la divine parole nous l'assure, à plus forte raison les membres doivent être affligés.

Dans le corps naturel, si la tête fait mal, ou le coeur, tout le reste des membres est dans la peine. L'on n'est point à son aise, quand ces principales parties sont dans la douleur. Mais quelle apparence que le roi n'entre dans son royaume, qui lui appartient de droit, qu'à force de plaies ; et que l'esclave des démons à qui l'enfer est dû, le possède sans qu'il lui en coûte rien !

Retenez bien les paroles de l'Écriture, disait notre bon Sauveur à sainte Thérèse : Le serviteur n'est pas au-dessus du maitre. (Matth. X, 24) C'est une vérité tout à fait sensible : mais, hélas ! pourquoi n'en faisons-nous pas l'application ?

Ou je suis, disait encore notre maitre, mon serviteur y sera (Joan XIV, 3). Il est bien juste : et quel moyen de faire autrement, puisque nous avons encore le très grand honneur, honneur inconcevable, d'être ses membres ?

Comment le chef ira-t-il d'un côté, et les membres de l'autre ? Vous voyez bien, vous qui lisez ceci, que cela est impossible, à moins que les membres ne se séparent de leur chef : en ce cas, ce seront des membres sans vie, morts et pourris, qui ne seront plus propres qu'à être jetés dans les feux de l'enfer.

Disons ici, faisant réflexion sur cette vérité : Hélas ! À quoi pensons-nous, quand nous pensons à ne pas souffrir ? C'est vouloir l'impossible, et voilà la plus haute folie du monde. Oh ! Que c'est donc avec grande justice que notre maître s'écrie en saint Luc : Celui qui ne porte pas sa croix après moi ne peut pas être mon disciple. (Luc. XIV, 27). Pesez bien ces paroles : Ne peut pas être. Il ne dit pas : Il aura de la difficulté à l'être, mais il ne le peut.

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CHAPITRE IV

Qu'il faut nécessairement marcher par la voie de la croix


Voilà donc le grand sujet de la doctrine de la croix, que Notre-Seigneur prêchait à tous les peuples, Il ne leur découvrait pas tous les mystères du règne de Dieu, et quoiqu'il en donnât la connaissance à ses disciples, comme il le témoigne, il y avait cependant plusieurs choses, comme il assure, qu'il ne leur disait pas, parce qu'ils n'y étaient pas encore disposés.

Mais, pour la doctrine de la croix, il la prêchait autrement, sans aucune remise et sans aucun retardement. Ô prudence humaine, que deviens-tu ici ? Ne semblait-il pas qu'il fallait attendre que ce peuple grossier, à qui notre bon Sauveur parlait, fût plus disposé ?

Si ce divin maître réservait de certaines choses à dire, même à ses disciples, après la venue du Saint-Esprit, y avait-il rien en apparence qui ne méritât plus qu'une doctrine si sévère, et en ce temps presque inouïe, et à l'égard d'un peuple tout charnel ?

Dautant plus que ce peuple, au lieu d'en faire un bon usage, s'en scandalisait, en murmurait jusque-là que quelques-uns voulurent précipiter du haut dune montagne ce divin Naître qui l'enseignait, et ses proches le voulurent garrotter, disant que c'était un furieux.

Pourquoi prêcher une doctrine qui a de telles suites ? Cependant il en parlait tout haut publiquement et à découvert, et il disait à tous : Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il porte sa croix. (Matth. XVI, 24) Il le disait à tous, à ses disciples et aux peuples les plus grossiers ; et il en parle si généralement qu'il n'y met aucune exception.

Si quelqu'un veut venir après moi, c'est-à-dire qui que vous soyez, riche ou pauvre, savant ou ignorant, grand ou petit ; fussiez-vous général d'armée, prince, roi ou empereur ; de quelque qualité et condition que vous puissiez être, de quelque âge, soit jeune on vieux ; de quelque sexe, soit homme ou femme ; de quelque état, soit dans le siècle, soit hors du siècle ; si quelqu'un d'entre vous veut venir après moi, qu'il porte sa croix, il faut se résoudre à la souffrance.

C'est pour cela que l'Évangile nous apprend que ses miracles faisant un grand éclat, et remplissant d'étonnement et d'admiration ceux qui les voyaient, il en désoccupait ses disciples, et leur recommandait de mettre bien avant dans leurs coeurs les discours qu'il leur faisait de sa mort et passion, dont il les entretenait dans le temps de ses actions les plus miraculeuses ; pour leur marquer que ce n'étaient pas les consolations qui nous doivent arrêter en cette vie, mais bien les peines et les travaux.

Que dites-vous donc, ô Chrétien, quand vous vous plaignez de vos peines ? Faites-vous bien réflexion à la qualité que vous prenez ? Être Chrétien, et être crucifié, c'est une même chose.

Si vous renoncez aux souffrances, il faut renoncer au christianisme. En vérité, encore une fois, savez-vous bien ce que vous faites, quand vous parlez de ne point souffrir ? Est-ce que vous voulez quitter la religion chrétienne, renier votre baptême, et n'être plus des disciples de Jésus-Christ ?

Or, si vous voulez en être, attendez-vous à des peines, soit d'esprit, soit de corps ; soit de la part des hommes, dont les contradictions ne manquent pas ; soit de la part de l'enfer, qui vous combattra toujours ; soit de la part de la nature corrompue, de vos inclinations, de vos passions et de vos humeurs. Souvenez-vous bien de ce que l'Église chante, que la croix est notre unique espérance. Il n'y a rien à espérer que par cette voie.

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CHAPITRE V

Que le bonheur du Chrétien consiste à souffrir en ce monde
Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet


Si la voie de la croix est nécessaire au salut, quel plus grand bonheur que d'y être ! Et au contraire, y a-t-il malheur comparable à celui de n'y pas être ? Mais si c'est le grand chemin royal, comme il a été montré, n'est-ce pas un grand bonheur que d'y marcher en assurance ? C'est pourquoi, comme nous le dirons, la croix est la véritable marque de la prédestination ; et de vrai, les membres sont sauvés par la conformité qu'ils ont avec leur chef.

Disons de plus, n'est-ce pas un bien tout extraordinaire de se voir dans la souffrance, puisque dans le sentiment des saints, il n'y a pas de gloire comparable à celle des croix ? La voie de la croix est le grand et véritable moyen qui, dans la séparation qu'il porte à des créatures, nous unit à Dieu, et nest-ce pas dans cette union que se trouve le bien des biens, et le souverain bien ?

Ô mon âme, quel bonheur que celui des souffrances ! Elles sont, disait une sainte âme, nos pères et nos mères, qui nous ont engendrés sur le Calvaire.

Ceux qui ne les reçoivent pas ressemblent à ceux qui chassent leur père et mère de la maison. Sainte Thérèse assure que c'est une rêverie de penser que Notre-Seigneur reçoive qui que ce soit en son amitié, sans le mettre à l'épreuve par des peines ; et son grand directeur, le vénérable père Balthazar Alvarez, parlant sur ce sujet, disait :

« Si le supérieur d'une maison était le premier à l'oraison du matin, et aux autres exercices, et que les autres demeurassent au lit, sans doute que cela le fâcherait ; à plus forte raison, Notre-Seigneur, étant ce qu'il est, et se voyant le premier à la croix, ne sera pas content, si on ne veut pas lui tenir compagnie. »

Disons encore que le bonheur des souffrances est extrême ; puisque celui qui a la croix a tout. Elle purifie, et satisfait ; elle délivre, et sauve ; elle embellit, et orne ; elle enrichit, et ennoblit. Elle est utile aux bons et aux vicieux, parce qu'elle fait avancer à la vertu les uns, et qu'elle purifie les autres de leurs fautes, et leur en obtient le pardon.

Il faut encore dire, ce que l'on ne peut assez répéter, que ceux qui sont sauvés ne sont sanctifiés que par la même grâce qui est en Jésus ; autrement l'esprit de Jésus serait contraire à lui-même, et tout autre dans le chef que dans les membres.

Or, la grâce de Jésus est une grâce qui cloue et qui attache à la croix. L'esprit de la croix est l'esprit de notre esprit ; il est la vie de notre vie.

Ceux qui souffrent davantage, dit un serviteur de Dieu, accomplissent plus ce qui manque à la passion du Fils de Dieu, car il lui manque que le fruit en soit appliqué :

l'application d'une grâce qui prend sa -source dans les souffrances, se fait beaucoup mieux par les croix, que par une autre voie.

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CHAPITRE V

Que le bonheur du Chrétien consiste à souffrir en ce monde
Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet


Sainte Thérèse assurait que Notre-Seigneur envoyait plus de croix à ceux qu'il aimait plus spécialement ; elle avait appris cette doctrine de la bouche du même Fils de Dieu, qui lui avait dit : mon Père envoie de plus grands travaux à ceux qu'il aime davantage.

Il ne faut que savoir ce qui s'est passé dans la religion chrétienne, pour être entièrement persuadé de cette vérité. Jamais personne n'a été plus aimé du Père éternel, que le divin Jésus ; et, jamais personne n'a tant souffert. Après Jésus, la très sainte Vierge surpasse toutes les créatures en grâces, et en même temps elle les surpasse en peines.

La mesure donc de notre bonheur se doit prendre de la mesure de nos croix. Heureux celui qui souffre, plus heureux celui qui souffre davantage, très heureux celui qui est accablé de toutes sortes de peines, qui ne vit que de croix, qui y passe toute sa vie à l'imitation de notre bon Sauveur et de sa sainte mère, et enfin qui y expire !

Mais c'est une vérité de foi, que la béatitude de cette vie consiste dans les larmes. Bienheureux ceux qui pleurent (Matth. V, 5) dit la Vérité même. Or, par les larmes, sont entendus tous les sujets d'affliction qui nous peuvent arriver, qui sont capables de toucher et de tirer des larmes :

et notre divin Maître voulant en expliquer quelque chose plus en particulier, déclare à ses apôtres, qu'ils seront bienheureux lorsqu'ils seront maudits, et même que l'on en dira faussement toute sorte de mal, lorsqu'ils seront haïs, rebutés, chassés, et que leur réputation sera perdue.

C'est pourquoi le Saint-Esprit prononce cet oracle dans les Écritures : Voici que nous béatifions ceux qui ont été dans les souffrances (Jac. V, 11), et il apporte le témoignage des deux Testaments de la loi ancienne et de la nouvelle, par les exemples de Job et de l'adorable Jésus, pour ôter tous les doutes que l'on pourrait se former sur ce sujet. De là vient que le grand Apôtre, instruisant les fidèles leur apprend qu'outre le don de la foi, le don des croix leur a été de plus accordé.

Ce qui mérite bien d'être pesé avec beaucoup d'attention, pour en concevoir l'estime que l'on doit en avoir : car enfin, c'est un grand don de Dieu que celui des peines. Aussi la très sainte vierge a révélé à une sainte âme, qui a souffert des peines dont l'on ne trouve point de semblables dans toutes les vies des saints, qu'elle avait employé tout son crédit pour les lui obtenir ; et pour ce sujet elle lui fait faire beaucoup de pèlerinages très pénibles, des jeûnes extraordinaires et quantité d'autres mortifications.

On rapporte de la même sainte personne, que, priant Notre-Seigneur pour un pauvre marchand fort tourmenté de soldats qui étaient logés chez lui, ce bon Sauveur lui dit que ce marchand était bien obligé à ses soldats, c'était parce qu'ils servaient d'instrument à la divine Providence pour le faire souffrir.

Mais l'esprit humain, poussé d'un secret amour-propre, ne manque pas de raisonnements pour opposer à cette doctrine de la croix.

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Que le bonheur du Chrétien consiste à souffrir en ce monde
Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet


Quel plaisir, dira-t-il, Dieu peut-il prendre dans ces voies de souffrances ? Quel bien en tire-t-il pour les âmes, ou quelle gloire pour son saint nom ? Certainement, Dieu, de soi-même, est toute bonté : son plaisir est d'en faire, et de combler de biens ses chères créatures.

Son dessein, quand il a créé l'homme, n'a pas été de lui faire porter des peines, mais de lui faire mener une vie bienheureuse en ce monde et en l'autre. Cela est vrai, à ne regarder que le premier état de choses ; mais l'homme s'étant dépravé et, corrompu par le péché, il s'est de lui-même engagé à la peine qui lui est nécessaire pour le tirer de sa corruption, et le rétablir dans un état de salut.

C'est pourquoi Dieu lui envoie des souffrances, comme un bon père qui fait prendre des médecines amères à son enfant malade, qui lui est bien cher ! Hélas, son plaisir serait de ne pas donner cette peine à son enfant : mais supposez sa maladie, il y est obligé ; et c'est son amour qui le presse d'en user de la sorte.

Il est aisé de voir ensuite le bien qu'il en arrive aux âmes, et la gloire que Dieu tout bon en tire, puisque le salut éternel s'y opère. Ô quel bonheur ! Ô le bonheur ! Ô le souverain bonheur ! Plusieurs des chapitres de ce petit ouvrage, donneront assez de lumière sur cette vérité.

Cela est difficile à comprendre, dira quelqu'un. Voici ce que le grand prélat répond à cette difficulté au chapitre 16 de la Lutte spirituelle : Ceci vous semblera difficile à croire, dit ce grand homme ; mais si vous vous souvenez que les rameurs en leur assiette, tournent leurs épaules au lieu où ils conduisent leur barque, vous ne trouverez pas étrange que Dieu, par l'eau et le feu de la tribulation, vous fasse tendre au rafraîchissement.

Et au chapitre 6 du même livre : Qui ne sait que les arbres, plus battus des vents, jettent de plus profondes racines ; que l'encens ne jette son odeur que quand il est brûlé ; que la vigne ne profite que quand elle est taillée ? Pourquoi tant de fléaux, tant de pauvretés, de pestes, de famines, de guerres, et d'autres misères, si ce n'est pour le bien des élus ? Le Fils de Dieu n'a-t-il pas mis la consommation de notre salut dans la consommation de ses souffrances, et le délaissement même du Père éternel ?

Mais les souffrances, répliquera-t-on, ne sont pas la fin des états spirituels. Il est bien vrai ; mais ce sont les moyens qui y conduisent. Voulez-vous, sous prétexte que ce ne sont que des moyens, ne vous en pas servir ?

est le terme qu'un homme se propose dans le dessein qu'il prend d'aller en cette première ville du monde ; tous les villages, bourgs et villes qui y mènent, ne sont que des moyens par où il faut passer : cependant il est nécessaire de passer par ces moyens, autrement on n'y arrivera jamais.

Or, pendant que nous sommes en cette vie, nous sommes toujours dans la voie ; nous n'arriverons parfaitement et entièrement à notre fin, qu'après la mort ; et en ce monde il y a toujours à combattre : ce qui ne se fait pas sans peine. De là vient que l'Écriture nous enseigne que la vie de l'homme sur la terre, est un combat ou milice (Job VII, 1) : et le Fils de Dieu donne pour partage, en cette vie présente, les pleurs et les larmes à ses disciples.

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Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet


On répartira encore que, dès cette vie même, les états les plus crucifiants conduisent à la jouissance de Dieu. J'en demeure d'accord ; mais cette jouissance, comme l'enseigne très bien saint Augustin, n'est pas sur la terre en sa totale perfection :

c'est pourquoi elle n'est pas exempte de croix, qui sont données toujours en ce monde, ou pour purifier l'âme de plus en plus, ou pour l'embellir, l'orner et l'enrichir davantage.

De quelque côté que vous preniez la chose, vous verrez le besoin des croix, puisqu'il y a toujours à purifier ou à perfectionner de plus en plus.

Cela est clair, quant à ce qui touche la perfection dans les peines de la très sainte Vierge. J'avoue qu'il y a de certains états de croix qui ne durent pas toujours, de certaines peines qui ne sont que pour de certains temps, et de certaines dispositions de quelques états intérieurs.

Dieu est le maitre, il sait les appliquer, selon sa très grande sagesse, aux uns plus, aux autres moins. J'avoue qu'il y a de certaines âmes qui souffrent, par la divine grâce, avec tant de vigueur qu'elles semblent ne pas souffrir en souffrant. Nous dirons dans la suite de cet ouvrage que les voies des croix sont différentes : cependant ce sont des croix.

Tout ce qu'il y a à faire dans les voies divines, est d'y être en la manière que Dieu veut. Ce n'est pas à nous à nous faire nos croix, nous n'avons qu'à les recevoir de la main de Dieu, ou grandes ou petites, ou pesantes ou légères, selon qu'il lui plaira en disposer.

Seulement il faut prendre garde à une illusion de quelques spirituels, qui, sous prétexte de jouissance de Dieu, veulent nous introduire dès cette vie, dans un état tout de consolations et de joies, et ne parlent de souffrances que comme des choses qui ne sont que pour un certain temps.

Je l'ai déjà dit, je demeure d'accord qu'il y a quelques voies crucifiantes qui ne sont pas pour toujours ; mais cette règle n'est pas générale, comme il paraît par l'exemple de plusieurs saints, qui ont porté des peines intérieures étranges durant tout le cours de leur vie.

Par exemple, un saint Hugues, qui en a été tourmenté jusqu'à la mort ; et dans nos derniers temps, le saint homme le P. Jean de Jésus Maria, général des Carmes déchaussés, qui témoignait en mourant n'en être pas quitte ; comme aussi la vénérable mère de Chantal, qui paraissait, en sa dernière maladie, n'en être pas délivrée.

Il y en a que Dieu conduit par une voie mêlée de souffrances et de consolations. Ce qui fait dire à un serviteur de Dieu ces paroles : « Comme l'orfèvre retire de temps en temps son ouvrage du feu, le travaille, et regarde s'il est parfait, et n'étant pas encore achevé, il le rejette en la fournaise ; de même quelquefois Dieu retire l'âme des travaux, lui donne quelques consolations ; mais, n'étant pas encore bien purgée, elle est rejetée dans ses peines. »

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Dieu est toujours infiniment adorable et aimable en ses conduites. Il est le maître souverain qui fait bien tout ce qu'il fait. Ce n'est point à la nature à les examiner ; son droit est de s'y soumettre en aveugle, avec une entière soumission et un très grand amour.

Toujours est-il très vrai que les croix nous sont bonnes, en quelque état que nous puissions être. Premièrement, pour satisfaire à la justice divine en l'union des satisfactions de notre bon Sauveur. Hélas ! nous avons mérité de souffrir à jamais dans l'enfer, pour nos péchés ; nous avons mérité d'être privés de la présence de Dieu, et de toute consolation pour un jamais : avons-nous donc sujet de nous étonner si nous portons des peines et des privations durant le cours d'une vie qui passe sitôt. Secondement, nous en avons toujours besoin pour être purgés de nos imperfections.

Nous l'avons déjà dit, il y a toujours en cette vie quelque chose à purifier : les saints tombent dans quelques imperfections, et il est assuré que la moindre empêche l'entrée du ciel. C'est pourquoi on rapporte de quelques saintes âmes, admirables en leurs vertus, qui ont même passé par des états intérieurs de très grandes croix, qu'elles n'ont pas laissé d'aller en purgatoire.

Toute notre vie, disait saint François de Sales, n'est qu'un noviciat, nous ne ferons la profession d'une entière et totale profession qu'après la mort. En troisième lieu, les croix sont nécessaires pour nous humilier. C'est le sentiment de saint Grégoire, qui enseigne que celui qui est plus ravi en contemplation est plus travaillé de tentations. L'exemple de saint Paul est un témoignage indubitable de cette vérité.

C'est ce qui fait, selon la doctrine du même Père, que souvent on trouve une plus grande douleur, en cela même qu'on bâtit pour le repos. D'où vient que le Prophète a bien dit : Vous lui avez renversé son lit dans son infirmité (Psal. XL, 4) ; comme s'il disait : Tout ce que quelqu'un s'est préparé pour le repos, vous lui avez changé cela en trouble. En quatrième lieu, les croix sont toujours avantageuses, parce qu'elles servent à l'augmentation de la grâce, de l'amour de Dieu, du mérite et de la gloire. De là vient que Notre-Seigneur en a fait si bonne part aux âmes sur lesquelles il avait de grands desseins.

C'est ainsi, dit sainte Thérèse, qu'il s'est comporté avec ses saints, qu'il a chargés de peines après leur avoir départi ses grâces, et un don sublime d'oraison. Il est rapporté de la sainte mère de Chantal, que notre Sauveur récompensa ses peines par de nouveaux supplices.

En cinquième lieu, la conformité des membres avec leur chef, demande d'être crucifiés avec lui, avec celui qui n'a pas été un moment sans douleur, et qui, dans le temps même de la communication de la gloire à son saint corps sur le Thabor, en avait l'esprit occupé, et s'entretenait de sa douloureuse passion.

Le glorieux saint Ignace, fondateur de la Compagnie de Jésus, pénétré de cette vérité, assurait que, quand la gloire de Dieu serait égale dans la consolation et dans la souffrance, il aimerait toujours mieux la souffrance, parce qu'elle donne plus de rapport à notre divin maitre. Oh ! Que c'et une chose honteuse, s'écriait saint Bernard, devoir un membre dans la délicatesse sous un chef couronné d'épines !

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Quelqu'un objectera ici ces paroles de notre Sauveur : Venez à moi, vous tous qui travaillez et qui êtes chargés de chaînes, et je vous soulagerai. (Matth. XI, 28) Il est certain que Dieu, fidèle en ses promesses, soulagera tous ses disciples : mais comment ?

Il les soulagera par le repos éternel qu'il donnera en l'autre vie ; il les soulagera en la vie présente par la force qu'il leur donnera à porter leur croix, ce qui est commun à tous ceux qui souffrent, car quoique le don de force ne soit pas égal, sa grâce est abondante dans toutes les âmes crucifiées. Il les soulagera quelquefois par des consolations sensibles ; mais c'est ce qui n'arrive pas à tous.

Il les soulagera encore par la délivrance de certaines peines ; mais ce que l'on doit remarquer, est que, par ces paroles, on ne doit pas entendre ordinairement ni un soulagement sensible, ni la délivrance totale des peines ; autrement comment accorder cette vérité avec l'état public de tant de saintes âmes qui ont eu recours à Jésus-Christ, et qui ont toujours été dans la peine ?

On objectera encore ces paroles de l'Apôtre : Réjouissez-vous tous au Seigneur (Philip. IV, 4) ; et on en conclura que le bonheur est donc dans la joie. Mais il est facile de répondre à cette objection : car ou l'Apôtre entend parler d'une joie sensible, ou d'une joie qui réside en la cime de l'âme, et qui est bien souvent imperceptible.

De dire qu'il veut parler d'une joie sensible, c'est ce qui ne se peut pas : car ce serait aller contre toute expérience, contre tout ce qui se lit dans la Vie des saints, contre toute la doctrine des Pères de l'Église et des maîtres de la vie spirituelle, et contre l'autorité même de l'Écriture en la bouche du même Apôtre, que l'on ferait tomber dans une contradiction manifeste ; puisqu'il assure qu'il a souffert outre mesure, et non seulement extérieurement, mais qu'il a été dans les angoisses d'esprit, jusque-là même que quelquefois la vie lui était à charge ; et cela, non seulement par le désir qu'il avait de voir Jésus-Christ, mais encore par la grandeur de ses peines, qui lui faisait dire qu'il était ennuyé de vivre.

Donc il est manifeste que cette joie continuelle dont il parle, ne peut s'entendre de la joie sensible, qui n'est pas toujours permanente en ce monde-ci. Il parie donc d'une joie qui réside en la cime de l'âme, qui vient d'une abondance de paix qui donne la parfaite conformité avec la volonté divine ; car l'âme ne voulant que ce que Dieu veut, est toujours contente en tout ce qui lui arrive.

Or, cette paix ou cette joie est si souvent cachée, que non seulement les sens n'y ont aucune part, mais encore la partie raisonnable inférieure. Nous avons parlé suffisamment dans notre livre Du règne de Dieu en l'oraison mentale, de la différence de la partie inférieure raisonnable, d'avec la suprême partie de l'âme ; ce qu'il est assez nécessaire de savoir, plusieurs savants même les confondant, et entendant par la partie inférieure, la sensitive et animale. L'exemple de notre Sauveur éclaircit entièrement la chose, puisque son âme était affligée d'une tristesse mortelle, en même temps qu'elle jouissait de la gloire.

Source : livres-mystiques.com

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CHAPITRE V

Que le bonheur du Chrétien consiste à souffrir en ce monde
Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet



Or, dit saint François de Sales, cette tristesse ayant porté ce bon Sauveur à demander à son Père que ce calice amer passât loin de lui, s'il était possible, et ayant ajouté qu'il n'en allât pas comme il voulait, mais selon la volonté de son Père, il est évident que Notre-Seigneur n'était pas seulement affligé dans sa partie sensitive qui n'a point de volonté, mais encore dans la partie inférieure raisonnable.

Jésus jouissait donc d'une joie inénarrable dans la suprême partie de son âme, en même temps qu'il souffrait les tourments les plus grands qui furent jamais.

Ce qui marque bien que la joie dans la cime de l'âme peut s'allier avec tous les états intérieurs les plus pénibles.

Et dans le temps que notre bon maître était si délaissé de son Père qu'il s'en plaignit publiquement, n'est-il pas vrai que la gloire de son âme était égale et qu'elle possédait la joie de la vision béatifique !

Il faut donc dire que la joie continuelle à laquelle l'Apôtre exhorte n'est autre que celle qui réside en la suprême partie de l'âme, par une entière conformité à la volonté divine ; joie qui souvent est imperceptible, qui n'est nullement aperçue, ainsi qui laisse l'âme dans la désolation, qui ne sait en plusieurs états si elle est résignée au bon plaisir divin, qui ne connaît pas ce qui se passe dans son fond, tout cet acte réfléchi lui étant ôté.

Cette joie était véritablement dans ces saintes âmes qui ont souffert des peines d'esprit jusqu'à la mort ; mais comme elle n'était nullement aperçue, elle n'en recevait aucune consolation.

Mais, ajoutera-t-on, plusieurs se forment des états imaginaires des peines surnaturelles, ou se causant des souffrances par leur imprudence et par leur faute.

Il est aisé de répondre que ces abus ou fautes sont à éviter, que nous ne les approuvons pas ; mais les abus qui se rencontrent dans les états les plus saints, ou les fautes que l'on y commet, n'ôtent pas la perfection et l'excellence de ces états.

Pour ce qui regarde les abus, il les faut détruire avec la grâce de Notre-Seigneur. À l'égard des fautes, on en doit avoir regret et cependant en porter les peines avec patience, en en faisant un saint usage.

Toutes les âmes qui sont en purgatoire y sont pour leurs fautes et leurs péchés ; ce sont des peines qu'elles se sont procurées d'elles-mêmes par leurs offenses : cela n'empêche pas que ce ne leur soit un très grand bonheur d'y être purifiées pour jouir de la vision de Dieu.

Source : livres-mystiques.com

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CHAPITRE V

Que le bonheur du Chrétien consiste à souffrir en ce monde
Réponse à quelques difficultés que l'on objecte sur ce sujet


On ajoutera que les consolations sont bonnes et que les lumières sensibles sont des dons de Dieu. Tout cela est vrai ; mais aussi il est sûr qu'elles sont dangereuses à raison de la nature.

On ne pourrait pas nier sans erreur que les biens naturels ne soient bons, comme par exemple l'or et l'argent, les terres, les vignes et choses semblables, qui sont les richesses de la vie présente ; que ce soient des dons de Dieu, et avec cela le Fils de Dieu s'est déclaré bien nettement au sujet de ces biens, et a prononcé : Malheureux ceux qui les possèdent, à raison du danger qui s'y trouve !

Il a mis le bonheur dans la souffrance de la pauvreté, qui en prive. Appliquez ceci aux consolations spirituelles, qui sont les richesses dont l'amour-propre s'entretient. Nous ne disons pas que ce soit chose mauvaise que ces consolations ; nous disons même qu'elles sont utiles et nécessaires à quelques âmes pour les aider dans leurs faiblesses :

nous avouons que Dieu les donne quelquefois à de très grands saints : que ceux qui en ont les doivent recevoir avec action de grâces, comme les personnes riches leurs biens temporels, et en faire un saint usage, sans s'y attacher.

Mais, à dire vrai, le bonheur de la vie présente consiste plutôt dans leur privation que dans leur jouissance. Premièrement, comme il a été dit, à raison du danger de l'amour-propre qui s'y glisse facilement.

Notre-Seigneur parlant à une sainte âme, lui dit qu'il le fallait bien plus remercier pour les afflictions que pour les consolations, parce que les consolations enivraient de vanité et d'orgueil ; que, pour mille qui se perdent dans les afflictions, dix mille périssent dans les consolations sensibles, qui sont la pâture de l'amour-propre. Secondement, le diable souvent s'y mêle.

Une femme avait des consolations si grandes qu'elle en était toute transportée et était obligée de dire qu'elle n'en pouvait plus : la sainte Vierge révéla que c'était le diable qui les lui donnait, et dit que quand l'âme s'épanouit par ces voies, le démon s'en approche et lui brouille l'esprit de plusieurs pensées et affections qui viennent de l'amour-propre.

En troisième lieu, c'est un retardement à la perfection. Il en arrive à peu près dans ces voies sensibles, comme à un voyageur qui, ayant bien du chemin à faire, au lieu d'aller tout droit, s'amuse à la rencontre des belles maisons et des beaux jardins que la curiosité presse de voir.

Il n'en est pas de même de celui qui ne trouve en son voyage que des lieux désagréables et fâcheux ; il marche sans aucun retardement, et n'est-il pas vrai quil arrive plus tôt au lieu où il va, et où il a affaire ? En quatrième lieu, il y a plus d'amour de Dieu, généralement parlant, dans la privation des goûts et lumières sensibles, car il y a moins de créatures. Nous en avons traité plus amplement en notre livre Du règne de Dieu en l'oraison mentale.

Source : livres-mystiques.com

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